La psychothérapie : le lieu de l'expérience créatrice
Ce soir, un petit billet pour réfléchir sur ce que l'on peut attendre d'une psychothérapie.
Lorsque je suis sortie des mes études universitaires en Psychologie, je me sentais bien peu légitime à exercer… Pourquoi ? parce que j'avais un savoir intellectuel sur l'étiologie (l'origine) des différents troubles, voir pathologies psychiques, comme disposant d'un inventaire des aléas du développement, mais que je ne voyais pas comment aider les patients avec cela. Comment faire avec Mr D qui a tellement souffert de l'absence de sa mère dans son enfance qu'il a trop peur de souffrir pour s'engager dans une vie familiale? que dire à Mme T qui a eu un père si exigeant qu'elle se dévalorise dans tout ce qu'elle fait, tant ce n'est jamais assez? On a beau avoir une idée de ce dont la personne souffre, comment fait-on pour réparer? puisque c'est bien pour cela que les gens viennent nous consulter, pour aller mieux, pas juste pour savoir pourquoi ils ont des difficultés! Quoi dire à ceux qui arrivent avec l'espoir que je vais leur donner la recette du bonheur en 45 minutes, clés en main?
- Le savoir : Tout d'abord, que le psychothérapeute n'est pas magicien, ni Guru d'ailleurs. Qu'est-ce qu'un Guru? Quelqu'un qui prétend savoir pour vous ce qui vous convient. Le psychothérapeute n'a aucune légitimité à prendre des décisions pour vous. Vous restez maitre de ce que vous vivez. En ce sens, ce n'est, selon moi, pas lui qui vous dira de quitter votre travail, de changer de partenaire, ou de lieu de vie... Le principe de base étant que l'individu est maitre de ce qui lui arrive. En ce sens, il est important de comprendre que la psychothérapie n'est pas un lieu où le consultant vous dira quoi faire, à la d'un parent tout puissant et détenteur du savoir. En contrepartie, vous ne pouvez pas lui demander de vous trouver des solutions instantanées à vos difficultés et souffrances. C'est plutôt une posture d'allié bienveillant, de soutien sans jugement, qui va cheminer avec vous, vous guider pour que vous puissiez trouver en vous les solutions qui sont les meilleures pour vous actuellement (et qui ne seront certainement pas les mêmes que celles du voisin!). Là, nous rejoignons le principe d'unicité de chacun. Il n'y a pas de voie universelle vers le bien-être. C'est comme une plongée sous-marine, vers les profondeurs de votre être que nous opérons, et dont je suis l'accompagnateur et le Co enquêteur, avec mes outils et ma grille de lecture pour vous guider.
- La posture : celle qu'on apprend hors des bancs de l'université, sur le terrain, par des formations complémentaires, par une humanité qui ne s'apprend pas dans les livres. La posture de l'allié bienveillant dont je parlais. C'est toute l'importance que vous puissiez vous exprimer sans crainte de jugements, même si ce sont des choses qui sont difficiles pour vous à énoncer à quelqu'un d'autre. Que votre vécu sera respecté, dans toute la tonalité affective qui vous vivez. C'est selon une posture d'accueil, une présence du cœur, conjointement au savoir intellectuel. C'est que le psychothérapeute s'autorise à être touché par ce que le patient dit, par vivre les émotions que cela lui fait ressentir, pour pouvoir s'en servir comme levier thérapeutique. C'est par cela que s'opère la rencontre, le lien, qui n'est pas juste une recherche d'informations.
La création, l'expérience nouvelle : C'est pour moi avec ce cœur, ce lien qui reste le principal outil thérapeutique, que le changement peut s'amorcer. Je suis respectueuse de chaque outil, chaque approche thérapeutique, même celles dont je m'informe peu pour cela. J'ai coutume de dire que quelque soit le courant thérapeutique auquel le praticien est formé, la relation reste l'outil principal de notre travail. A cela s'ajoute les différentes grilles de lecture, et les différents outils. Et c'est ce mélange qui va autoriser le patient à essayer de nouvelles choses, par cette relation sécurisante, imprégnée de confiance, dont il a parfois manqué, que nous allons ensemble créer quelque chose de nouveau, ici, dans le cabinet, que vous pourrez expérimentez dans votre vie à vous, rassuré de savoir que quelqu'un est là à vos côtés. C'est une reproduction de ce qui a fait défaut dans l'enfance, ce sentiment de pouvoir découvrir et oser essayer en toute sécurité par le regard bienveillant de l'autre.
L'idée étant ainsi que ce qui se passe entre nous dans le cabinet, vous puissiez désormais le trouver, ou le percevoir aussi dans votre environnement, et modifier ainsi votre perception du monde, des autres, et de vos possibles…
Car pour conclure, j'ai envie de revenir sur cette question du passé, et de l'enfance qui a fait l'introduction de ce billet… Oui, nous ne pouvons pas changer le passé. Mais par la psychothérapie, nous pouvons changer le regard que nous avons sur lui, et l'importance qu'il tient dans notre présent.
C'est ainsi que la psychothérapie me semble une co-construction. Elle demande, pour fonctionner, la mise au travail du thérapeute, et du patient, dans une relation mutuelle de confiance. En ce sens, ce n'est pas une solution clé en main!